Les liquides alimentaires entrant dans la catégorie des produits de la bactériologie acide doivent avoir un pH inférieur à 4,5. Dans ces produits il ne peut se développer que des micro-organismes non pathogènes, très spécifiques comme les bactéries acétiques, les bactéries lactiques ou les levures.
Il est admis qu'à des pH au-dessous de 3, les levures sont fortement inhibées, alors que certaines espèces de lactobacilles prolifèrent à ce pH et que la croissance des leuconostocs est encore active à un pH de 2,9.


Si ces micro-organismes qui résistent aux bas pH ne sont pas toxiques pour l'homme, ils peuvent gâter les aliments et notamment les boissons en les troublant, les décolorant, ou en leur communiquant des mauvais goûts.

 

Ces micro-organismes spécifiques du domaine de la bactériologie acide  ont la propriété d'être facilement détruits à des températures relativement basses, de l'ordre de 60o à 70 oC, (en tous cas inférieures à 100 oC) avec des temps de traitement relativement courts, de l'ordre de la seconde à la dizaine de minutes, suivant la température de traitement choisie.

A titre indicatif ; dans un flash pasteurisateur le maintien au chambrer de la bière a 72° C pendant 21 seconde suffira à la stabiliser microbiologiquement, dans un pasteurisateur tunnel cette même bière devra subir un traitement  à 60 °C pendant 20  minutes, dans les deux cas il s'agira d'une bière préalablement  filtrée avec une faible contamination initiale.

Parmi les liquides alimentaires entrant dans le domaine de la bactériologie acide et possédant un pH inférieur a 4,5, on trouvera tous ceux issus des procédés fermentaires et, en particulier, des fermentations acétique, lactique et  alcoolique (dont le vin et la bière), mais également, des produits acides naturellement, comme les fruits et leurs jus fraîchement pressés.

Figures ci dessous :  Gamme de pH des fruits et températures à mettre en œuvre pour la stabilisation de leur jus pour les traitements thermiques courts (Crédit Tétra pack)

ph jus de fruit conservation thermique

 

Rappel :Par définition, le pH est le cologarithme de la concentration en ion hydrogène (H+) d'une solution aqueuse. On définit ainsi un degré d'acidité allant de O à 7 et un degré d'alcalinité de 7 à 14 suivant la gradation :

0 (acide) -> 7 (neutralité) -> 14 (base)    

 

Plus un milieu est acide, plus il contient d'ions H+ et plus son pH est faible en valeur numérique.

 

Avec un pH  généralement situé entre 4,2 et 4,4,  la bière entre dans le domaine de la bactériologie acide , mais durant le processus de sa fabrication elle passe par  différents stades pendant lesquels elle sera caractérisée successivement par un pH voisin de 6 à l'empâtage a un pH de 5,2 dans le moût prêt a être ensemencé  en levures et n'atteindra un pH de 4,5 protecteur que vers le 4eme ou 5 eme jour de la fermentation  .

C'était pendant l'opération de refroidissement, après ébullition et houblonnage que le moût pouvait être contaminé dans un passé récent, quand on lui faisait subir une station prolongée dans un bac ouvert  a fond plat  ou un écoulement en nappe sur des échangeurs de température ouverts du type Beaudelot, et cela dans un environnement propice aux contaminations spontanées. Une flore constituée par des bactéries dites « Termo » pouvait s'installer dans le moût. (Le mot Termo venant du latin terminus  et signifiant à la limite du visible)  Cette flore est peu variée et comprend essentiellement des bâtonnets gram-négatifs, du groupe des « coliformes ». Ces Termos, seront facilement éliminés dès que la levure entrera en action , mais si la contamination est importante, ils pourront communiquer a la bière un goût proche de celui du cèleri. Actuellement avec les échangeurs de température fermés (échangeurs a plaques ou tubulaires) le risque de cette contamination a disparu , mais lors de la fabrication de  certaines bières, comme celle des bières sans alcool utilisant le principe de l'interruption précoce du processus fermentaire , il peur réapparaître , surtout si on recherche des valeurs très faibles d'alcool résiduel.

On attirera également l'attention des brasseurs artisans à veiller à limiter la dose de levure nécessaire a introduire à une refermentation en bouteille, pour ne pas avoir a subir les remontées de pH dues à une autolyse des levures en surnombre qu'un excès d'oxygène dissous va également favoriser le bon dosage oxygène et levure qui sera a déterminer par une expérimentation préalable

Le pH intra cellulaire de la levure par la présence des bases puriques contenues dans la cellule est voisin de 6. et l'autolisat sera a l'origine d'une remontée non souhaitée du pH dans la bière.

 

Critères conjugués de stabilité des boissons rafraîchissantes sans alcool (Crédit Procomac).  Ces critères pourront être pris en compte pour les bières sans alcool également :

 

Acidité relative du produit

pH

< 2,9

2,9 à 3,4

3,5 à 3,9

4 à 4,6

> 4,6

À multiplier par

1

1,5

2,5

4

6

           

Taux de contamination initiale

UFC/cc

< 1

1 à 10

10 à 100

100 à 1 000

> 1 000

À multiplier par

1

1,5

2,5

4

6

           

Taux de carbonatation du produit fini

gr CO2/L

> 8

8 à 6,1

6 à 4,1

4 à 2,1

< 2

À multiplier par

1

1,4

2

2,8

4

           

Concentration de jus de fruit et/ou de minéraux

%

< 5

5 à 10

10,1 à 15

15,1 à 20

> 20

À multiplier par

1

1,5

2

2,5

3

           

Concentration initiale d'oxygène

mgr O2/L

< 1

1 à 3,3

3,4 à 6,6

6,7 à 10

> 10

À multiplier par

1

1,2

1,4

1,7

2

           

UFC = unit forming colonies = nombre de micro-organismes revivifiables par litre de liquide. C'est donc la contamination initiale du produit alimentaire ou de son emballage.
< 5 : très stable,- 5 à 14 : plutôt stable - 15 à 29 : modérément stable - 30 à 50 : instables,
> 50 : très instable.
UFC = Somme des valeurs obtenues dans chaque catégorie

 

 

Autres facteurs intervenant dans la stabilité biologique : notion d'Aw

 

 

Les attitudes des micro-organismes acquises en fonction du milieu – notion d'AW

Constitués d'eau à 75 ou 80%, les micro-organismes ont besoin d'eau pour construire leur matière. Il ne suffit pas que l'eau soit présente pour qu'ils puissent la prélever. En effet lorsque l'eau contient des molécules dissoutes (sucre, sel....) des liens s'établissent entre l'eau et les molécules dissoutes, si bien que l'eau est plus

difficile à prélever pour les micro-organismes. Les micro-organismes sont en compétition avec les molécules dissoutes pour la capture des molécules libres dont ils ont besoin pour vivre.

 

La grandeur qui rend le mieux compte de l'état de liberté des molécules est l'activité de l'eau notée: Aw. Elle est mesurée par le rapport : pression de vapeur de la solution (p) sur la pression de vapeur de l'eau pure ( p0) à la même température :

Aw = p/p(à une température fixée et en équilibre) soit Aw=HR/ 100

Si on considère que dans un milieu clos, elle est approximativement égale à l'humidité relative de l'atmosphère en équilibre avec la solution considérée divisée par 100

HR peut être mesuré relativement facilement à l'aide d'un hygromètre. Aw  varie de 0 à 1 (eau pure). Chaque micro-organisme est caractérisé par l'Aw en dessous de laquelle il est incapable de croître. De la même façon  que pour les solutions, l'eau des aliments est en partie libre (disponible) et en partie liée aux différents composants (minéraux, glucides, protéines)

Les produits alimentaires peuvent être classés en fonction de leur activité de l'eau (Aw).

 

L'abaissement de l'activité de l'eau entraîne une sortie de l'eau des cellules des micro-organismes, une entrée des solutés et une synthèse de molécules osmoprotectrices. Chez la plus part des micro-organismes, il y a inhibition de la vitesse de croissance dès que l'activité de l'eau devient inférieure à 0,97.Cette vitesse chute jusqu'à devenir nulle pour une valeur minimum de l'activité de l'eau. Cette valeur minimum de l'activité de l'eau varie selon les groupes microbiens, et selon la nature du soluté. Pour une même activité de l'eau, sucres et sels ont des effets différents

 

.Ci dessous quelques valeurs pour des micro-organismes rencontrés en brasserie et d'activité de l'eau d'aliments :

- La plus part des bactéries d'altération; 0,90 - 0,91
- Saccharomyces cerevisiae: 0,90 - 0,94
- La plus part des moisissures 0,60 - 0,70
- Lait 0,995
- Confiture: 0,80-0,75
- Céréales 0,70

 

Conclusion :

La bière est un liquide alimentaire bien protégé par son pH mais également par les ingrédients qu'elle contient et qui ont des pouvoirs antiseptiques (houblon, alcool, CO2… ) qui permettent d'éliminer d'autres organismes comme les moisissures et toutes les autres agressions microbiologiques. La bière a aidé très certainement l'humanité a avancer en lui procurant une boisson saine même si elle était fabriquée avec une eau contaminée, et même aujourd'hui dans les pays en voie de développement c'est l'industrie de la brasserie qui s'installe en premier.

 

Pierre Millet
Ingénieur EBN (Ecole de Brasserie de Nancy)
Promotion 1963

 

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