La carbonatation d'une bière, sa pétillance, contribue directement à la formation de la mousse et à la perception du corps de la bière. Le dioxyde de carbone (CO2) contenu dans la bière exhauste les flaveurs, les sensations d'acidité et d'amertume, et améliore également sa stabilité et sa durée de vie. Si une première carbonatation se produit naturellement pendant la fermentation, les fermenteurs qui sont généralement ouverts et/ou non pressurisés ne permettent pas d'atteindre ou de maintenir un volume de carbonatation satisfaisant. Une étape de re-fermentation « naturelle » ou de carbonatation « forcée » est ainsi nécessaire.
Les principes de la carbonatation
La Carbonatation, exprimée en volume, représente la quantité de CO2 (Dioxyde de Carbonne) dissout dans un litre de bière, à 20°c et à pression atmosphérique. 1 volume correspond à 1 litre de gaz Co2 dissout dans 1 litre de bière. Elle est fonction de la température et de la pression qui déterminent l'équilibre de sa concentration et donc la durée de refermentation. L'augmentation de la pression et la baisse de la température améliore ainsi la dissolution du CO2 dans la bière qui est maximale lorsque la température est faible avec une pression forte.
La carbonatation répond à la loi de Henry : « À température constante, la quantité de gaz dissout dans un liquide est proportionnelle à la pression partielle qu'exerce ce gaz sur le liquide », c'est pourquoi lorsque l'on ouvre une bouteille, la pression diminue entrainant le retour à l'état gazeux du CO2 qui se matérialise sous forme de bulles. Une boisson gazeuse stockée à pression atmosphérique perd une grande partie du CO2 dissout et donc de sa pétillance.
La loi de Henry est bien connue aussi des plongeurs, qui doivent pour cela respecter des paliers de décompression pour permettre une évacuation progressive de l'azote dissout dans les tissus (contrairement à l'oxygène qui est utilisé par l'organisme) sinon des bulles se formeraient dans les organes pouvant provoquer AVC, paralysies et infarctus.
Des tables et logiciels permettent aux brasseurs de déterminer le volume CO2 au point d'équilibre, le moment où le CO2 ne peut plus se dissoudre, à une pression et une température données. En effet, la carbonatation dépend des caractéristiques du produit (sucres, levures, arômes, alcool…). La quantité de CO2 dans une bière est généralement comprise entre 2 et 3 volumes ce qui équivaut à 4 à 6 g/l.
Le Co2 est également nécessaire à la formation d'acide carbonique dans l'eau qui picote la langue et renforce le goût et donc la perception du corps de la bière. Une carbonatation élevée augmentera ainsi la perception de l'acidité comme c'est le cas avec certaines bières avoisinant 4-5 volumes comme les Sours, les Gueuzes ou bien les Weizens. La carbonatation par styles de bières doit être d'ailleurs respectée notamment lorsque l'on participe à certaines compétitions internationales.
Type de Bière |
Volumes de Co2 |
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American Amber Ale |
2.2-2.8 |
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American Brown |
1.5-2.5 |
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American Lager |
2.5-2.7 |
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American Pale Ale |
2.2-2.8 |
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American Pilsener |
2.6-2.7 |
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American Wheat |
2.3-2.6 |
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Bamberg Rauchbier |
2.2-2.6 |
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Barley Wine |
1.3-2.3 |
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Double Belge |
1.9-2.4 |
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Lambic au Fruit Belge |
2.6-4.5 |
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Lambic Belge |
3.0-4.5 |
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Ale Belge |
1.9-2.5 |
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Triple Belge |
1.9-2.4 |
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Blanche belge |
2.1-2.6 |
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Bock |
2.2-2.7 |
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Bohemian Pilsener |
2.3-2.5 |
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California Common |
2.4-2.8 |
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Cream Ale |
2.6-2.7 |
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Doppelbock |
2.3-2.6 |
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Dortmunder Export |
2.6 |
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Dunkelweizen |
3.6-4.5 |
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Düsseldorf Altbier |
2.2-3.1 |
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Eisbock |
2.4 |
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English Bitter |
0.8-1.3 |
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English Brown |
1.5-2.3 |
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English Mild |
1.3-2.0 |
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English Ale |
1.5-2.3 |
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Brune des Flandres |
1.9-2.5 |
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Pilsener Allemande |
2.5 |
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Helles Bock |
2.2-2.7 |
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Imperial Stout |
1.5-2.3 |
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India Pale Ale |
1.5-2.3 |
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Irish Dry Stout |
1.6-2.0 |
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Kölsch |
2.4-2.7 |
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Maibock |
2.2-2.7 |
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Märzen/Oktoberfest |
2.6-2.7 |
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Münchner Helles |
2.3-2.7 |
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Munich Dunkel |
2.2-2.7 |
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Oatmeal Stout |
2.3-2.6 |
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Porter |
1.7-2.5 |
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Schwarzbier |
2.2-2.6 |
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Scottish Ale |
0.8-1.3 |
|
Stout |
2.3-2.6 |
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Strong Scotch Ale |
1.5-2.3 |
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Sweet Stout |
2.0-2.4 |
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Weizen/Weissbier |
3.6-4.5 |
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Weizenbock |
3.7-4.7 |
Les Méthodes de carbonatation
Carbonatations Naturelles
Méthode traditionnelle
La méthode traditionnelle de carbonatation s'effectue au moment de la refermentation à la fin de la garde, par l'ajout de sucres fermentescibles qui agissent sur les levures restantes (environ 2 millions de cellules/ml de bière), dans un fût capable de résister à la pression tels les tonneaux en bois (Chêne) ou en acier inoxydable, pour quelques jours (3 à 7).
Kraüsening
Cette variante traditionnelle allemande consiste à ajouter 10% de moûts de fermentation frais appelés le « krausen ». Il apportera les sucres et levures, à une température de 8°c pendant 1 à 3 semaines. Le Co2 est dissout jusqu'à la fin de la fermentation et entraine la disparition des diacétyles (flaveurs beurre/gras/rance) et des aldéhydes (flaveurs verts/herbeux).
Lagering
Même procédé que le Kraüsening à l'exception du moût qui provient de la fermentation originelle.
Refermentation en Bouteille (et en fut)
La méthode la plus utilisée par les microbrasseurs, et l'une des étapes cruciales, la refermentation s'effectue par l'ajout de sucres fermentescibles en bouteille ou en fut scellé pour maintenir la pression contenant encore une partie de ses levures (entre 1 et 5 millions de cellules/ml de bière).
Cette étape qui dure environ 3 semaines doit être bien contrôlée par les microbrasseurs pour éviter tout risque d'explosion des bouteilles ou a contrario de se retrouver avec une bière « plate ».
Quand les levures ont digéré tout le sucre (dextrose) disponible, elles entrent dans une phase de repos et sombrent au fond de la bouteille formant un sédiment appelé "lie".
Les "bières sur lie" sont donc des bières carbonatées en bouteilles (pas d'injection de dioxyde de carbone sous pression).
En fonction des sucres utilisés (sucre de table, candy, miel, dextrose, extrait de malt, moût,…) différents calculs s'appliquent pour déterminer le volume de CO2 final.
Carbonatations par ajout de CO2 ou forcée
La carbonatation forcée est utilisée pour produire les bières de type lager, nécessitant un ajout de CO2 afin de produire des bulles très fines et pétillantes. Cet ajout de CO2 peut être effectué à partir de CO2 en bouteille ou de CO2 issu de la fermentation originelle.
Fermentation sous pression / Spunding
Cette méthode consiste à fermenter la bière sous pression, permettant d’avoir une bière carbonatée en fin de fermentation, qui pourra avoir lieu à des températures plus élevées tout en réduisant les esters.
Carbonatation en cuve
Les systèmes conventionnels utilisent une carbonatation qui s'effectue en cuve, elle consiste à injecter du dioxyde de carbone soit par une céramique soit par une pierre en acier inoxydable frittée immergée au fond de la cuve. Le volume de la cuve dépend du volume de bière et de la quantité de CO2 à dissoudre.
Une autre alternative consiste à injecter du dioxyde de carbone dans la bière au travers d'un saturateur situé entre la sortie du filtre et la cuve de carbonatation sous pression.
Carbonatation en ligne
La carbonatation en ligne consiste à injecter du dioxyde de carbone dans la bière au travers d'un diffuseur en inox fritté entre la sortie du filtre et la cuve.
Par exemple la boucle de carbonatation de notre partenaire Actemium, permet une injection de CO2 à régime variable sans cuve tampon. Ce système permet d'alimenter directement le groupe d'embouteillage tout en garantissant une parfaite dissolution du CO2 et qualité du produit fini. Cette nouvelle génération de système permet ainsi des économies (CO2, encombrement, temps de nettoyage et de changement de produit).
Boucle de Carbonatation Actemium
Remarque : dans le cadre de la Guiness et de bières de types stout, le système peut être combiné avec une injection d'azote, et même de nitrogène !, permettant de diminuer l'acidité et l'amertume, tout en améliorant la tenue en mousse et son onctuosité, grâce à des bulles plus fines et stables.
Le choix de la méthode de carbonatation dépendra avant tout de la structure et de la production de la brasserie. Si la refermentation en bouteille reste la méthode idéale pour les pico et microbrasseurs, le choix de méthodes plus industrielles présente un intérêt pour les brasseries artisanales soucieuses d'un contrôle précis de la carbonatation ou de la réalisation de types de bières spécifiques.
Sources/Références :
Actemium : www.actemium.fr/strasbourg-plant-solutions/solutions
Beer Carbonatation and its effect on Flavor : www.grapesandgrains.org/2017/08/beer-carbonation-and-its-effect-on-flavor.html
Carbonatation Demystified - Brewers Association : www.draughtquality.org/wp-content/uploads/2012/02/Carbonation_PH-Final_1.pdf
Refermentation en Bouteilles et Carbonatation - Bricole Brassicole : www.youtube.com/watch?v=sqF4NOq4XnI
Exploring the German Technique of Krausening : www.homebrewersassociation.org/how-to-brew/exploring-the-german-technique-of-krausening
Fermenting & Dry Hopping Under Pressure : scottjanish.com/fermenting-dry-hopping-pressure
Methode de Carbo (KEG) et mesure du volume de CO2 : http://lacapsuledupanda.com/index.php/2017/05/23/mise-en-keg-dune-ipa-carbonation-forcee/
The role of diacetyl in beer : draymans.com/the-role-of-diacetyl-in-beer
La loi de Henry - Plongée : www.cdp-plongee.com/t_henry.php
Vincent F.